Accueil  〉 Développement durable  〉 Energie  〉 Énergie, climat et industrie : les voyants passent au vert ?

Les entreprises industrielles intègrent le réchauffement climatique dans leurs démarches stratégiques et font de l’écologie un enjeu de performance… Limiter l’impact environnemental n’est plus une option et se joue à différents niveaux.

Selon une enquête réalisée en début d’année par la plateforme NooS.Global, 42 % des entreprises sur les 3 000 dirigeants français interrogés (des grandes entreprises aux TPE) parviennent à impliquer leurs employés et clients dans leur stratégie RSE (responsabilité sociétale des entreprises) et ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance)*. Si les entreprises répondantes affichent la volonté d’en faire beaucoup plus, elles sont seulement 41 % à prévoir de s’améliorer d’ici fin 2022.

L’enquête met en exergue une différence d’appréciation sur la crainte d’une perturbation de leur activité causée par les bouleversements climatiques. Plus du tiers (36 %) des ETI et 41 % des grandes entreprises estiment que le réchauffement aura un impact et émettent de fortes inquiétudes à ce sujet. Elles sont 45 % chez les TPE et 57 % pour les PME à estimer un risque modéré à faible, avec une anticipation de l’avenir moins alarmiste sur ces questions.

Pour autant, seules les grandes structures de 5 000 salariés et plus déclarent avoir une stratégie RSE-ESG complète à plus de 50 % pour 2022. Les ETI sont en bonne voie, avec une démarche en construction à 39 %. Les PME ont une stratégie encore à définir pour 36 % d’entre elles, et 47 % des TPE avouent n’avoir rien en préparation.

Une nature à préserver

Dans les faits, en Haute- Savoie, les évolutions vont clairement vers une prise en compte accrue du réchauffement climatique. D’abord parce que le département – et en particulier la vallée de l’Arve – est très préoccupé par la qualité de l’air et par celle de l’eau depuis des années. En matière de protection des milieux aquatiques, par exemple, le Syndicat mixte d’aménagement de l’Arve et de ses affluents (SM3A) agit de concert avec les entreprises et les structures professionnelles telles que le SNdec dans le cadre du projet “Arve pure”, en collaboration avec l’Agence de l’eau et les collectivités territoriales, afin de limiter l’impact des activités industrielles et notamment le rejet de polluants.

Mais les industriels haut-savoyards tendent aussi à limiter leurs rejets de CO2 parce que l’explosion du coût de l’énergie a mis en évidence l’urgence de concevoir une industrie moins gourmande. Au-delà, ces pratiques vertueuses sont un gage de qualité pour les donneurs d’ordres qui commencent à intégrer des exigences environnementales dans leurs cahiers des charges, mais aussi un facteur d’attractivité pour dénicher de nouveaux talents dans un contexte où le recrutement est très compliqué. Au sein des ateliers, d’énormes progrès ont été réalisés pour imaginer une industrie plus écoresponsable, avec des systèmes d’aspiration performants pour assainir l’air interne et préserver la santé des collaborateurs, et éviter les rejets de polluants à l’extérieur.

De nombreuses démarches pour la gestion de déchets ont également été mises en place pour les traiter et les valoriser, en particulier les copeaux d’usinage. Sans compter des actions sur la mobilité, grâce à des initiatives comme Mobil’Arve – pour répondre aux enjeux du plan de prévention de l’atmosphère – ou le réseau GreeN – qui fédère une centaine d’entreprises pour agir collectivement dans le cadre de politiques RSE. Il faut aussi mentionner le travail mené en collaboration avec le Cetim sur des problématiques d’optimisation du transport des pièces et machines des entreprises du décolletage.

Une somme d’actions

Les dirigeants se saisissent de ces questions et profitent notamment de la construction de nouveaux sites pour installer des technologies innovantes. Exemple avec Carbilly, à Saint-Pierre-en-Faucigny, filiale du groupe Pracartis (voir ÉcoMéca 94) qui a investi plus de 3 millions d’euros pour réaliser un bâtiment performant et l’équiper d’une centrale de filtration des huiles de coupe, installer des panneaux solaires sur le toit et des réseaux d’aspiration avec une capacité de 30 000 m3 par heure, pour extraire les brouillards d’huile et les poussières sèches, puis réintégrer les calories pour chauffer l’atelier l’hiver.

Arcom Industrie a fait le choix d’une technologie innovante avec un système pour rafraîchir son atelier (voir ci-contre). Les TPE et PME affichent également de grandes ambitions, comme Gaston-Perrollaz à Magland (voir ÉcoMéca 95) qui, lors de l’agrandissement de son bâtiment en 2018, en a profité pour remettre à neuf son réseau d’air, installer un nouveau compresseur moins énergivore et améliorer le traitement et la consommation de l’eau. Le volume des kilowatts heures a ainsi été diminué de 37 % depuis 2016 et les émissions de CO2 réduites de 27 tonnes par an. Le dirigeant Jean-Luc Moënne-Loccoz a même acquis le terrain à côté de l’usine pour créer un potager partagé avec ses collaborateurs et installer prochainement des panneaux solaires.

Chez Damso, la tonte des espaces verts a été confiée aux moutons de l’entreprise Savoy Paysage. Ces quelques exemples (et il y en a d’autres en Haute-Savoie) démontrent que beaucoup d’actions peuvent être menées à différentes échelles avec un seul objectif : limiter l’impact sur l’environnement pour le bien-être des salariés, des dirigeants et du territoire. Et ainsi assurer la pérennité de l’activité industrielle.

*Les ESG prennent en compte les émissions de CO2, la consommation d’électricité, le recyclage des déchets, la qualité du dialogue social, l’emploi des personnes handicapées, la formation des salariés, la transparence de la rémunération des dirigeants, la lutte contre la corruption et la féminisation des conseils d’administration.

Sandra Molloy

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Retrouvez ce dossier dans son intégralité dans EcoMeca Juin 2022.